Kit de 1er Secours : à portée de main pour être utile
Les lieux de travail doivent être équipés d’un matériel de premier secours adapté à la nature des risques et facilement accessible, prévoit le code du travail. Encore faut-il que celui-ci soit opérationnel et accessible.
La plupart des entreprises au-dessus d’une certaine taille sont pourvues d’un kit ou d’une armoire de 1er secours, d’ailleurs plus ou moins opérationnel, mais les PME auraient encore beaucoup de progrès à faire. Il suffit de se comparer à certains pays voisins (Grande-Bretagne, Allemagne, pays scandinaves…) ou aux Etats Unis pour prendre la mesure de notre retard : trousses incomplètes ou inutiles, car conçues sans intelligence, trousses en nombre insuffisant, mauvaise signalisation de leur emplacement, dates de péremption dépassées…
Bref, un effort relativement peux coûteux (quelques petites centaines d’euros par entreprise) serait assurément bénéfique. Le marché du 1er Secours se situe en France entre 10 et 12 millions d’euros », nous indique Maxence Roquette, directeur général du Laboratoire Esculape. C’est à dire qu’il s’agit d’un petit marché, bien en dessous de ce qu’il devrait représenter.
Equipement insuffisant
Il y a un gros potentiel d’équipement en France : les entreprises sont plutôt mal équipées à l’exception de celles qui sont régulièrement exposées à des risques, car elles sont contrôlées. En fait, sur le terrain, le tertiaire et de nombreux artisans, par exemple, sont plutôt peu ou mal équipés.
L’article R. 235-3-17 du code du travail prévoit l’aménagement d’un local de soins dans les lieux de travail neufs, dès lors que l’effectif de salariés prévu est au moins égal à 200 dans les établissements industriels et à 500 dans les autres établissements.
Ce local destiné aux premiers secours doit être facilement accessible et équipé de brancards ; il pourra contenir les installations et le matériel de premier secours. Un balisage, au moyen des signaux décrits dans l’arrêté du 4 novembre 1993 (forme rectangulaire ou carrée et pictogramme blanc sur fond vert), doit permettre de trouver rapidement ce local ou les lieux où sont implantés des équipements de premier secours. « Le meilleur emplacement pour les équipements de premier secours, c’est là où les gens sont exposés aux risques : dans l’atelier ou centré dans les locaux. », nous précise José Monte, de la société France Neir.
Trousses inutilisables
« Il y a beaucoup de trousses en service sur le marché qui, en réalité, ne sont pas réellement utilisables. C’est comme une chaussure sans chausse-pied : il y manque des éléments (serviettes contre les brûlures, serviettes désinfectantes, serviettes pour traiter les coups et les chocs) alors que ce serait pourtant le minimum. Il est fréquent que l’on ne trouve pas dans une trousse de premier secours des produits aussi indispensables qu’un flacon d’AES (pour se protéger d’une exposition au sang lors d’un accident et éviter une contamination croisée). », estime José Monte, qui précise: « On n’y trouve que des bandages, des pansements, des ciseaux, mais elles sont incomplètes et inutiles à 90% ! » L’opinion de ce professionnel peut sembler sévère, mais elle est plutôt partagée par la poignée d’experts français, fabricants ou assembleurs.
Aucun lien avec le DUE
L’élaboration du DUE (Document Unique d’Evaluation des risques) étant obligatoire dans toutes les entreprises et celui-ci devant en principe recenser tous les risques auxquels sont exposés les salariés, on aurait pu penser que ce document aurait été utile pour élaborer le contenu des trousses de premier secours et définir leur implantation dans les locaux. Il n’en est rien, semble t-il, alors même qu’il semblerait assez logique et sûrement bénéfique que ce soit le cas. Les incitations à l’équipement ou au simple respect du code du travail nous semblent insuffisantes en France.
Prix modeste
L’argument du coût, parfois avançé dans les entreprises de moyenne et petite taille ne tient pas la route : généralement, le prix d’une trousse d’urgence oscille entre 20 et 60 euros en fonction du contenu. « Le prix est plus élevé si la boite est mieux garnie, ce qui est le cas, par exemple, lorsqu’il est opportun d’ajouter des crèmes de soin pour les coups ou les brûlures, ou encore des steri-strips pour les coupures profondes. Il convient que les utilisateurs soient vigilants sur les dates de péremption des produits. Nous observons toutefois qu’une trousse utilisée régulièrement nécessite le plus souvent un renouvellement complet des différents produits » conclut Maxence Roquette.
« Pas de norme en matière de 1er secours »
 Maxence Roquette, Directeur général du Laboratoire Esculape
« Il n’y a pas de norme en matière de premier secours, juste l’obligation d’avoir une trousse de secours sur le lieu de travail et que celle-ci soit adaptée au nombre de personnes, aux risques et aux lieux, facteurs qui devraient déterminer le contenu de cette trousse. C’est une question d’analyse, de diagnostic des risques ou d’audit de sécurité, qui est effectué par le responsable sécurité, le CHSCT, l’infirmière, le médecin du travail ou encore un organisme extérieur. Cette analyse conduit à une préconisation. Il nous arrive de dispenser des conseils, pour lesquels nous nous appuyons sur notre expérience, sur les recommandations de la médecine du travail ou d’organismes comme l’OPPBTP. Les entreprises sont partagées entre le désir de trouver une trousse de secours idéale et les contraintes économiques. Nous observons qu’il y a un seuil psychologique, un frein lié au coût, pourtant modique. Par exemple, les artisans sont souvent indifférents au contenu des petites trousses ; ils veulent être en règle à moindre prix. En Allemagne, il y a des normes qui définissent un contenu précis, donc les trousses sont plus garnies et plus onéreuses. Si un employé a un problème et qu’il y a des complications, parce qu’il n’y avait pas de lave-œil ou un kit de récupération de membre sectionné, ou le nécessaire pour soigner une brûlure, il peut porter plainte contre son employeur. » 
Petite dépense… ou amende et risque pénal ?
Si l’on résume le risque pour un chef d’établissement qui n’aurait pas prévu les équipements de premier secours, cela devrait donner à réfléchir aux intéressés  le coût de ces équipements est modeste (les moins chers coûtent de 20 à 40 euros). En revanche, sans même compter les dommages personnels causés à celui qui aurait été mal secouru cela donne deux chiffres : 3.750 euros d’amende par infraction constatée, mais ce chiffre peut aller beaucoup plus loin puisqu’il est… à multiplier par le nombre de salariés directement concernés ! En cas d’accident, la sanction sera beaucoup plus sévère : 75.000 euros d’amende ou jusqu’à 5 ans de détention. Malheureusement, les contrôles positifs se soldent rarement par de telles sanctions… pourtant largement méritées.
Que dit la loi ?
Trousse de secours
Le code du travail indique que les lieux de travail doivent être équipés d’un matériel de premier secours facilement accessible (trousse ou armoire de secours) dont le contenu doit vous permettre d’effectuer les premiers soins. Article R. 4224-14 du Code du Travail : « Les lieux de travail sont équipés d’un matériel de premiers secours adapté à la nature des risques
et facilement accessible. »

Contenu de la trousse
Aucun texte ne détermine la liste de produits obligatoires, mais
le matériel doit être en bon état de fonctionnement et les produits ne doivent pas être périmés. C’est le médecin du travail qui fixe le contenu de la trousse de secours et/ou de la pharmacie d’entreprise et les modalités d’utilisation des produits. 
Cette trousse de secours ne doit pas contenir de médicaments.
On retient généralement : Antiseptique cutané (en dosettes à usage unique), compresses stériles, pansements prédécoupés, sparadrap hypoallergénique, bandes extensibles, ciseaux à bouts ronds, pince à échardes, gants à usage unique (utiliser des gants à usage unique pour tout soin comportant un contact avec le sang ou un produit biologique). Pour les locaux à risques spécifiques on peut éventuellement compléter le contenu de la trousse par doigtiers de protection, rince yeux (en doses à usage unique), kit « membre sectionné » pour section de doigt ou de main, pommade pour brûlures superficielles ou peu étendues, ouate hémostatique pour légers saignements ou petites plaies, pommade pour contusions, masque de bouche à bouche, couverture de survie, coussin hémostatique d’urgence.

Signalisation
L’emplacement de la pharmacie ou des trousses de secours
doit être connu des salariés.
Article R. 4224-23 : « Ce matériel doit faire l’objet
d’une signalisation »
Dispositions à prendre
Article R. 4224-16 : « En l’absence d’infirmière ou d’infirmier, lorsque leur nombre [...] ne permet pas d’assurer une présence permanente de ce personnel, l’employeur doit prendre, après avis du médecin du travail, les dispositions nécessaires pour
assurer les premiers secours aux accidentés et aux malades.
Ces dispositions sont consignées dans un document tenu
à disposition de l’Inspecteur du Travail ».
3 questions au Docteur Fabrice Lochet, Médecin cardiologue, ACMS 
Dans quel cadre s’inscrit la mise à disposition d’une trousse d’urgence et de secours au sein d’une entreprise ?
En premier lieu il est important de rappeler que l’évaluation des risques dans l’entreprise doit être faite conjointement par l’employeur et le médecin du travail. Le chef d’entreprise a une responsabilité directe dans la prévention et la prise en charge des urgences. Il est bien évident que les mesures à prendre sont différentes d’un secteur d’activité à l’autre. Il faut savoir aussi qu’il n’y a pas d’obligation légale en matière de contenu.

Que doit contenir cet équipement de protection collective ? Existe-t-il un contenu type ?
Si on veut définir  une trousse d’urgence standard, plusieurs éléments sont à prendre en considération. Rappelons en premier lieu que celle-ci ne doit pas comporter de médicaments afin d’éviter toute erreur d’administration ou d’éventuels accidents allergiques, surtout si il n’y a pas de médecin dans l’entreprise.
Il faut par ailleurs prévoir des produits désinfectants, comme du Mercryl, des compresses stériles, une ou deux bandes, des pansements autocollants, des ciseaux, une pince à épiler ou encore des gants jetables. Dans certains cas il faudra aussi intégrer dans la trousse des produits de rinçage oculaire, ou des coussins hémostatiques si celle-ci est destinée à un atelier.

En ce qui concerne la maintenance des trousses, quels sont les points à prendre en considération ?
Dans le cas où l’entreprise ne compte pas de service médical il est important de désigner un responsable pour ce genre d’équipement. Il aura en charge de remplacer les produits après utilisation et de vérifier que les dates de péremption, notamment des antiseptiques,  ne sont pas dépassées. Dans un environnement à risques spécifiques comme peut l’être le secteur du BTP par exemple, ou le milieu hospitalier, il est important de réévaluer régulièrement la pertinence des actions que l’on a pu mettre en œuvre en cas d’accident. L’efficacité de la chaîne des secours repose sur 4 éléments indispensables : l’évaluation du risque, l’organisation, les moyens mis en œuvre, et une réévaluation périodique.