Bruit : on doit faire mieux !
À l’occasion de la 10ᵉ édition de la Semaine Santé Auditive au Travail, l’Association nationale de l’audition (Ana) a dévoilé les résultats de la 9ᵉ vague de son Baromètre bruit et santé auditive au travail. Réalisée pour la première fois selon les catégories de salariés, cette enquête met en évidence de fortes disparités quant à l’exposition au bruit et à ses effets sur la santé.
Le bruit, un facteur omniprésent dans le monde du travail
Plus d’un actif sur deux (56 %) déclare être gêné par le bruit sur son lieu de travail. Les environnements les plus touchés restent l’industrie, les open spaces et les ateliers, mais aucune activité n’est épargnée : le commerce, les services, l’administration et même le télétravail sont désormais concernés. Seuls les bureaux individuels fermés offrent une réelle réduction de la gêne (42 %).
Le baromètre rappelle que le bruit ne se limite plus à un risque de surdité. Il agit sur la santé mentale, altère la concentration, accentue le stress et détériore la qualité des relations professionnelles.
Près de trois quarts des salariés constatent des répercussions sur leur état de santé, qu’elles soient auditives (acouphènes, surdité) ou psychologiques (fatigue, irritabilité, stress, troubles de l’attention). Certains groupes apparaissent particulièrement vulnérables.
Les femmes sont les plus nombreuses à rapporter des effets négatifs (77 %), principalement liés à la fatigue et aux difficultés de concentration. Les ouvriers et salariés de l’industrie subissent davantage de troubles auditifs : 44 % d’entre eux souffrent d’acouphènes et 38 % de surdité. Les personnes à revenus modestes signalent dans 64 % des cas des conséquences physiques et auditives, notamment des troubles du sommeil et de l’hypertension. Enfin, les salariés diplômés montrent des atteintes plus marquées sur le plan psycho-cognitif, traduisant une fatigue intellectuelle accumulée face au bruit constant.
Des efforts de prévention encore limités
Malgré l’impact du bruit sur la santé, peu d’actifs adoptent des mesures de prévention. Seuls 27 % ont demandé un équipement de protection, 22 % ont réalisé un test auditif et 21 % ont consulté un médecin. Les plus jeunes (moins de 35 ans) se montrent plus proactifs, tandis que les plus âgés paraissent s’accommoder de la situation. Les ouvriers et salariés de l’industrie bénéficient plus souvent d’équipements adaptés, en raison des réglementations spécifiques de leur secteur.
Du côté des employeurs, la mobilisation reste incomplète : seule la moitié propose des actions concrètes, essentiellement sous la forme de protections individuelles. Les aménagements des espaces, les programmes de dépistage ou les campagnes d’information demeurent rares. Cette faiblesse, ajoutée à la complexité administrative et à la peur d’être stigmatisé, limite le recours à la Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé (RQTH) pour les personnes déjà affectées par des troubles auditifs.
Privilégier une approche globale du bruit au travail
Face à ces constats, l’ANA appelle à repenser la gestion du bruit dans les milieux professionnels. L’enjeu n’est plus seulement de prévenir les atteintes auditives, mais aussi de prendre en compte les dimensions psychologiques et sociales du phénomène. Une stratégie plus globale permettrait de réduire les inégalités entre les différentes catégories de travailleurs, de protéger les plus vulnérables et d’améliorer durablement la santé et la qualité de vie au travail.
Photo d’illustration © Getty Images




