Conditions de travail et addictions
La Dares et la Drees ont réalisé, dans le cadre du projet de recherche « Santé mentale, expériences du travail, du chômage et de la précarité », l’étude Accolade pour analyser les liens entre l’épuisement physique, les troubles du sommeil et des conduites addictives (alcool, tabac, cannabis, sucre…) chez les travailleurs précaires. Les auteurs, Guillaume Airagnes et Joane Matta, responsables scientifiques à l’AP-HP, Nadine Hamieh, chercheur chargé du projet, et Marie Zins, directrice de l’infrastructure de recherche Constances y montrent que « des facteurs de risque professionnels tels que l’épuisement physique et les horaires atypiques sont associés à une consommation plus importante de substances psychoactives. » Même si les auteurs soulignent que ces liens ne sont pas « significativement » différentes entre les travailleurs précaires et les autres actifs. D’où, pour lesdits auteurs, « l’intérêt d’adresser des messages de prévention et de sensibilisation à l’ensemble des travailleurs, sans distinction de statut socio-professionnel. »
Cela dit, l’étude montre que l’épuisement physique au travail peut être associé à consommation de tabac, de cannabis, de gras et de sucre. Et induire, par exemple : une augmentation du risque de rechute chez les anciens fumeurs, de devenir de gros fumeurs (≥ 20 cigarettes/jour) pour les fumeurs actuels, une augmentation de la consommation de cannabis au moins une fois par mois ou d’avoir un régime alimentaire riche en sucre et en gras…
Par ailleurs, toujours selon cette étude, les « horaires de travail atypiques sont associés à la consommation de tabac, de cannabis et d’alcool ». Par exemple, pour le travail de nuit, il aggraverait le risque de devenir grosse fumeuse chez les femmes actuellement fumeuses ou de consommer du cannabis au moins une fois par mois chez les hommes.
Travailler le samedi ou le dimanche peut avoir également des conséquences sur les pratiques addictives : devenir gros fumeur, consommation d’alcool…
Pour les auteurs du rapport, « ces résultats pourraient être repris dans le cadre des campagnes d’information et de prévention en santé publique et en santé au travail afin de faciliter le repérage standardisé des conduites addictives chez les travailleurs exposés à ces conditions de travail difficiles et de les orienter vers des soins spécialisés lorsque cela est nécessaire. » Mais, selon eux, « aucune des analyses n’a permis de montrer qu’un sous-groupe de travailleurs pourrait être plus à risque. En particulier, il convient de ne pas se focaliser uniquement sur les travailleurs précaires mais d’adresser ces mesures de santé publique à l’ensemble des travailleurs. »
Photo d’illustration © Getty Images